Réunion de novembre (2) au CDJ : 1 plainte fondée (RTL-TVI), 1 plainte partiellement fondée (La Dernière Heure), 1 plainte non fondée (RTL-TVI)
3 décembre 2020
Le Conseil de déontologie journalistique a adopté trois avis sur plainte lors de sa deuxième réunion de novembre. Une plainte a été déclarée fondée (RTL-TVI), une partiellement fondée (La Dernière Heure), et une non fondée (RTL-TVI).
La première plainte, déclarée fondée (20-20 S. Ben Brahim c. N. L. & N. G. / RTL-TVI),visait une séquence du JT de RTL-TVI consacrée à la situation des personnes précarisées pendant la crise sanitaire liée au Covid-19 , dans laquelle témoignaient des personnes sans-abri. La plaignante reprochait aux journalistes et au média de l’avoir non seulement rendue reconnaissable alors qu’elle avait accepté l’interview à condition que son visage ne soit pas filmé, mais aussi de l’avoir présentée comme une « travailleuse issue du trafic sexuel » alors qu’elle leur avait dit être « travailleuse de rue ». Dans son avis, le CDJ a constaté que les journalistes avaient manqué à leur devoir de vérité en extrapolant la présentation du témoin sans vérifier auprès de l’intéressée si cette interprétation était correcte. Il a également noté qu’en mentionnant le prénom de la plaignante, qu’il a associé à sa voix, à des lieux précis et à des détails vestimentaires, le média permis, par convergence, à un public autre que ses proches de l’identifier directement ou indirectement sans doute possible. Il a relevé, au vu de la situation du témoin et de son apparente précarité et fragilité, que le média aurait dû préserver son anonymat complet, même si ce dernier n’avait pas explicitement été demandé. Il a conclu que dès lors qu’il avait diffusé une information erronée et non rectifiée (le CDJ a rappelé que le retrait d’une séquence en ligne ne peut en aucun cas, assimilé à une rectification explicite) à son propos, le média avait, même si c’était de manière involontaire, porté atteinte à l’honneur et à la réputation du témoin.
La deuxième plainte, déclarée partiellement fondée (19-07 SPRL Fun International c. G. D. / La Dernière Heure), visait la publication, dans le quotidien La Dernière Heure, de deux articles consacrés à un jeu concours en ligne permettant de gagner une maison, et dont la légalité posait question. La plaignante – la SPRL organisatrice du concours – reprochait principalement au journaliste des manquements au respect de la vérité dans l’enquête qui l’amenait à conclure à l’illégalité du jeu, contestant notamment la source anonyme mise en avant par le journaliste et soulignant l’absence de condamnation de son activité par la Commission des jeux de hasard. Concernant le premier article, le CDJ a constaté que le journaliste s’était appuyé sur les informations d’une source qu’il estimait digne de crédit pour aborder le sujet, que l’avis technique de celle-ci valait pour expertise, et qu’il était légitime de ne pas l’identifier dès lors qu’elle souhaitait préserver son anonymat. Il a considéré que l’enquête du journaliste lui permettait d’affirmer que la Commission enquêtait sur le jeu et son analyse des sources juridiques et du site internet de conclure à l’illégalité du jeu. Concernant le second article, le CDJ a en revanche constaté que le journaliste affirmait péremptoirement, au moins à une reprise, que la Commission considérait le jeu comme illégal alors qu’aucune source ni aucun élément de l’enquête publiée la veille ne permettaient d’établir que l’instance aurait émis un avis en ce sens.
La dernière plainte, déclarée non fondée (19-11 M. Nassogne c. N. D. D. / RTL-TVI), concernait l’intervention en duplex d’un journaliste de presse écrite dans l’émission spéciale « C’est pas tous les jours les élections » de RTL-TVi, où il commentait le phénomène de l’abstentionnisme à Charleroi. La plaignante reprochait principalement au journaliste d’avoir conclu son intervention en déclarant que tant qu’il n’y aurait pas d’université à Charleroi, le taux d’abstention y resterait élevé. Elle estimait cette déclaration erronée, d’une part parce que Charleroi dispose d’implantations universitaires sur son territoire, d’autre part parce que le journaliste utilisait la corrélation – établie – entre niveau d’études et participation au vote comme seul et unique lien de causalité dans sa démonstration. Le CDJ a constaté que les propos contestés du journaliste relevaient du registre de l’opinion. Il a également noté que les faits sur lesquels celle-ci reposaient étaient avérés dès lors qu’il parlait d’université complète et qu’il apparaissait, dans la réponse qu’il donnait à la plainte, qu’il n’ignorait pas les différents autres indicateurs qui pouvaient intervenir dans l’abstention qu’il avait exclus après comparaison personnelle entre Charleroi et les villes wallonnes avec université. Si le Conseil a estimé que ce raisonnement aurait pu être utilement donné au public de manière à lui permettre de comprendre le phénomène mis en avant, pour autant il a considéré que ne pas l’avoir fait ne constituait pas en contexte l’omission d’une information essentielle. Il a rappelé, pour le surplus, que le format court des interventions télévisuelles – qu’elles aient été ou non préparées, qu’elles soient diffusées ou non en direct – a un effet par nature réducteur sur la complexité des raisonnements ou des propos.
Fin novembre, 40 plaintes étaient en traitement au Conseil de déontologie journalistique.