Réunion de mars au CDJ : 1 plainte fondée (contre un journaliste), 1 autosaisine fondée pour partie (RTL-TVi – « Dans ma commune »), 1 plainte non fondée (Télésambre) et 1 demande d’avis sur pratique jugée conforme (Télésambre)

Le Conseil de déontologie journalistique (CDJ) a adopté quatre décisions (trois sur plainte, dont une autosaisine, et une sur demande d’avis) lors de sa réunion de mars. Pour trois de ces décisions, dont la question centrale portait sur la couverture des élections communales, deux se sont avérées non fondées, la troisième partiellement fondée pour omission d’information essentielle. Dans la quatrième décision relative aux propos tenus par un journaliste sur les réseaux sociaux, le CDJ a conclu à une plainte fondée.
La première plainte, déclarée fondée (24-32 X c. F. A. (Facebook)), concernait des propos qu’un journaliste de La Nouvelle Gazette Charleroi avait tenus sur Facebook, à l’encontre d’une personne ayant critiqué un de ses articles. La partie plaignante reprochait au journaliste de profiter de son statut pour proférer publiquement des propos sexistes. Le CDJ a constaté qu’en dehors des éléments factuels apportés en réponse à la critique initiale, le post Facebook et les commentaires en cause usaient d’expressions qui relevaient du sexisme et incitaient à la discrimination sexuelle lorsqu’ils s’adressaient à l’autrice de la critique. Il a estimé que la campagne de harcèlement dont le journaliste se disait être victime ne l’exonérait pas du respect des règles déontologiques ni n’excusait la teneur des propos litigieux. Il a en outre pointé le défaut de responsabilité sociale du journaliste qui avait lui-même amplifié la publicité de ses propos en les partageant sur une page tierce consacrée au football féminin belge, où leur nature sexiste était d’autant plus regrettable qu’en tant que journaliste, il est chargé de la couverture du football féminin.
La deuxième plainte, déclarée non fondée (24-40 A. Willems c. Télésambre), visait un reportage de Télésambre qui s’intéressait, dans le cadre de la campagne électorale, à la présentation du programme et des candidats de la liste PS chapelloise. Le plaignant, qui reprochait de manière générale au média de ne mettre en avant que les actions positives du PS chapellois, estimait que la diffusion de ce sujet à cinq jours du scrutin communal, en décalage avec le moment de son enregistrement, ne contribuait pas à informer le public de manière équilibrée, soulignant par ailleurs des erreurs factuelles non rectifiées en lien avec cette diffusion tardive. Le CDJ a considéré que la présentation de la liste résultait d’un fait d’actualité, qu’elle ne pouvait en raison de l’angle choisi et de sa brièveté évoquer toutes les tendances qui s’opposaient sur le territoire de la commune, pointant notamment qu’une autre séquence similaire avait été consacrée peu de jours auparavant à une liste de cartel qui coalisait plusieurs groupes de l’opposition. Il a par ailleurs relevé que le décalage entre la réalisation et la diffusion de la séquence – que le média expliquait par la nécessité de distiller les actualités de ce type liées à sa zone de couverture durant la totalité de la campagne – n’enlevait rien à sa pertinence en contexte dès lors qu’elle avait été diffusée dans le cadre de la période électorale et que l’information donnée restait conforme aux faits. Il a relevé que rien dans le dossier ne permettait non plus de conclure que la décision du média de diffuser la séquence et l’article en ligne cinq jours avant le scrutin visait à influencer ce dernier.
La troisième plainte, une autosaisine déclarée fondée pour partie (24-50 CDJ c. RTL-TVi (« Dans ma commune »)), concernait un débat électoral de RTL-TVi consacré à la ville de Nivelles. Constatant que le CSA avait ouvert un dossier d’instruction sans solliciter l’avis de première ligne du CDJ, ce dernier s’est autosaisi et a jugé après examen que l’émission contrevenait pour partie à la déontologie. S’il a estimé que la rédaction garantissait globalement un équilibre d’ensemble et une équité de traitement des différentes listes communales susceptibles de se soumettre, en Fédération Wallonie-Bruxelles, au choix des électeurs, pour les vingt débats communaux qu’il organisait dans le cadre de la série « Dans ma commune », le CDJ a cependant relevé qu’elle n’avait pas informé le public des variations – légitimes – qu’elle avait apportées aux modalités du débat fixées dans son dispositif électoral. Le Conseil a estimé que, ce faisant, la rédaction ne permettait pas aux spectateurs de comprendre ce qui justifiait cette différence de traitement et en quoi l’équilibre et la représentativité qu’elle avait posés dans son approche initiale étaient de la sorte toujours respectés.
Lire le communiqué spécifique consacré à la décision 24-50
La demande d’avis (25-10 Demande d’avis de Télésambre (débats électoraux communaux)) visait les débats électoraux que Télésambre a organisés dans le cadre de la campagne électorale d’octobre 2024 pour les communes de Lobbes, Thuin, Merbes-le-Château, Pont-à-Celles, Chimay, Erquelinnes et Les Bons Villers. Interpellé par le média qui avait constaté que le CSA instruisait cette question de nature rédactionnelle sans solliciter le CDJ, le Conseil s’est estimé compétent pour en traiter et a retenu que les différents débats en cause assuraient la représentativité et l’équilibre des forces en présence. Il a en effet notamment relevé que : i) les modalités de participation aux débats avaient été fixées par la rédaction et intégrées dans le dispositif électoral mis à disposition du public – et du CSA – en amont de la campagne électorale ; ii) les journalistes et la rédaction avaient assuré un traitement équitable de toutes les listes en présence en leur appliquant ces modalités de manière identique ; iii) les listes nouvelles non représentées dans les débats en raison de ces modalités avaient fait l’objet de traitements journalistiques qui tenaient compte de faits pertinents pour une information correcte. Le CDJ a par ailleurs rappelé d’une part que confier automatiquement à une liste une place dans un débat, en dépit de l’intérêt que cette liste peut réellement revêtir, retirerait à la rédaction et aux journalistes l’exercice de leur liberté rédactionnelle, d’autre part que le fait qu’un média soit ou non reconnu comme média de proximité et tenu à des obligations légales particulières en raison de sa mission de service public n’enlevait rien ni à l’indépendance, ni à la liberté de sa rédaction.
Lire le communiqué spécifique consacré à la décision 25-10
Début avril, 23 plaintes étaient en traitement au CDJ. Entre la réunion plénière de février et celle de mars, 3 plaintes se sont soldées par une solution amiable. 17 autres plaintes n’ont pas été retenues, soit parce qu’elles ne répondaient pas aux conditions de recevabilité formelle, soit parce qu’elles n’entraient pas dans le champ d’exercice de la déontologie journalistique, soit parce que l’enjeu déontologique soulevé n’était pas rencontré (plainte manifestement non fondée). Toutes les parties plaignantes en ont été dûment informées.