Réunion de juin au CDJ : 2 plaintes fondées (Sudinfo), 1 avis sollicité par le CSA (non fondé)
Le Conseil de déontologie journalistique a adopté deux décisions sur plainte (Sudinfo) lors de sa réunion de juin. Les plaintes, toutes deux fondées, concernaient d’une part une Une qui induisait le public en erreur sur le rôle que la personne photographiée avait joué dans les faits évoqués par la titraille, d’autre part un défaut de droit de réplique (et de prudence globale) dans un article relatif à un scandale sexuel, ayant entraîné un portrait univoque et chargé d’un biais sexiste de la personne mise en cause. Le CDJ a par ailleurs répondu à la sollicitation d’avis du CSA sur plusieurs plaintes émises à l’encontre d’un reportage de la RTBF (JT) traitant des violences LGBTQIA+.
La première plainte, déclarée fondée pour partie (23-45 M. Bolle c. J.-L. P. / La Nouvelle Gazette Sambre et Meuse (Sudinfo)), visait une Une consacrée au licenciement de deux agents communaux pour relation sexuelle sur leur lieu de travail. Le plaignant – le directeur général de la commune concernée – reprochait notamment au média d’avoir diffusé des informations confidentielles et d’avoir publié sa photo sans son autorisation, l’assimilant ainsi erronément aux faits dénoncés. Le CDJ a constaté que la Une induisait les lecteurs en erreur sur le rôle que le plaignant, dont la photo apparaissait en gros plan, avait joué dans les faits présentés en titraille. Le Conseil a en effet relevé que tels qu’énoncés et agencés, titre, sous-titre et photo laissaient entendre qu’en tant que responsable du management, le plaignant aurait été impliqué dans l’affaire ayant conduit au licenciement, au risque de porter atteinte à sa réputation. Le Conseil n’a pas retenu les griefs formulés à l’encontre de l’article (papier et en ligne).
La deuxième plainte, également fondée pour partie (24-01 S. Davin & DéFi ASBL c. E. D. & L. B. / Sudinfo), concernait deux articles consacrés à un scandale sexuel impliquant des agents de la prison de Lantin. La plaignante reprochait aux journalistes de ne pas avoir vérifié leurs informations, de ne pas l’avoir contactée au préalable et d’avoir violé son droit à l’image et sa vie privée. Le CDJ a observé qu’en n’ayant pas sollicité, avant diffusion du premier article, le droit de réplique d’une des personnes – rendue identifiable – gravement mise en cause dans ledit scandale (la plaignante), la journaliste s’était privée de la version de l’intéressée qui lui aurait permis de recouper à première main les informations la concernant. Il a également considéré que la journaliste avait manqué de prudence en relayant tels quels et sans distance les jugements de valeur exprimés par les sources sur le comportement sexuel de cette personne, notant qu’il en ressortait un portrait univoque et chargé d’un biais sexiste. Le Conseil n’a pas retenu les griefs formulés à l’encontre du second article.
Le CDJ s’est également prononcé, lors de cette séance plénière, sur une sollicitation d’avis du CSA à l’égard de 20 plaintes relatives à une séquence du JT de la RTBF du 17 mai consacrée à la Pride. Ces plaintes, qui portaient sur une question commune à la déontologie journalistique et au droit audiovisuel, visaient plus particulièrement la diffusion de propos – jugés homophobes – tenus par la co-présidente de l’ASBL Rainbow Cops lors de son interview, qui invitait les personnes LGBTQIA+ à se montrer moins démonstratives dans l’espace public. Le Conseil réuni en plénière a considéré que les plaintes étaient manifestement non fondées, relevant notamment que le fait de relayer le point de vue potentiellement surprenant et polémique de l’intervenante présentait un intérêt pour le public dès lors qu’il avait été traité en toute responsabilité journalistique : le journaliste ne reprenait à aucun moment ces propos à son compte, il veillait à en expliciter le sens et il s’en distanciait prudemment. Dans le commentaire amorçant l’interview, il résumait le cadre dans lequel l’échange intervenait, et dans l’extrait qu’il partageait avec le public, il choisissait de faire entendre l’étonnement explicite qu’il manifestait à leur écoute. Soulignant qu’il ne retenait pas l’éventualité d’une ingérence de l’éditeur de service dans le traitement de l’information (qui autoriserait le CSA à rendre une décision après lui), le CDJ a communiqué sa décision au CSA pour qu’il la transmette telle quelle aux plaignants. Il a, en marge de cette décision, également enjoint le régulateur à respecter l’articulation de leurs compétences (prévue par le décret du 30 avril 2009), constatant que le CSA interférait dans les missions du CDJ lorsqu’il demandait au média de répondre aux plaintes alors que le CDJ était toujours en procédure de traitement.
Début juillet, 18 plaintes sont en traitement au CDJ. Entre la réunion plénière de mai et celle de juin, 11 plaintes n’ont pas été retenues, soit parce qu’elles ne répondaient pas aux conditions de recevabilité formelle, soit parce qu’elles n’entraient pas dans le champ d’exercice de la déontologie journalistique, soit parce que l’enjeu déontologique soulevé n’était pas rencontré (plainte manifestement non fondée). Tous les plaignants en ont été dûment informés.