Réunion de février au CDJ : 1 plainte partiellement fondée (Le Vif / L’Express), 2 plaintes non fondées (Le Soir, BX1)
8 mars 2021
Le Conseil de déontologie journalistique a adopté trois avis sur plainte lors de sa réunion de février. La première plainte qui visait un article d’investigation et une brève a été déclarée fondée uniquement pour ce qui concerne la brève (Le Vif / L’Express), les deux autres plaintes ont été jugées non fondées (Le Soir, BX1).
La première plainte (18-34 Divers c. M.-C. Royen / Le Vif) visait un article d’investigation et une brève du Vif / L’Express consacrés au malaise que suscitait la candidature de M. H. El Hajjaji à une place en tête de liste du parti Ecolo à Verviers. Les plaignants, Ecolo et Mme Khattabi, M. El Hajjaji, la Ligue des Musulmans de Belgique, reprochaient notamment à l’article d’investigation de considérer que la coprésidente du parti faisait preuve de communautarisme en soutenant « avec force » la candidature de M. El Hajjaji, de qualifier la candidature de ce dernier de « communautaire », de l’associer à tort aux Frères musulmans via la description de ses différents engagements, de relayer à propos de La Ligue des Musulmans des informations erronées qui alimentent la suspicion envers elle et ses membres. Les deux derniers plaignants estimaient également que la brève qui évoquait les suites du processus de désignation des candidats tête de liste au sein de la locale Ecolo de Verviers diffusait des informations inexactes à leur propos. Dans l’avis qu’il a déclaré fondé uniquement pour ce qui concerne la brève, le CDJ a constaté que celle-ci procédait d’un double raccourci en présentant M. El Hajjaji comme un « membre formel et non démenti de deux institutions des Frères musulmans ». Le CDJ a observé que si ces deux affirmations reposaient sur une importante analyse sourcée publiée quelques semaines auparavant dans le magazine, pour autant les nuances avec lesquelles elles avaient été originellement établies n’y apparaissaient plus. Il a considéré, en contexte, au vu de la gravité du sujet, que ce double raccourci était contraire à l’art. 3 du Code de déontologie. Pour ce qui concerne l’article d’investigation originel sur lequel s’appuyait cette brève, le CDJ a estimé que le travail d’enquête de la journaliste avait été mené avec sérieux, qu’il se basait sur de nombreuses sources recoupées et vérifiées, qu’il ne déformait ni n’omettait d’information, qu’il respectait le droit de réplique des personnes mises en cause et qu’il n’avait en conséquence enfreint aucun des griefs soulevés par les plaignants.
La deuxième plainte, déclarée non fondée (19-16 ORW c. F. Soumois / Le Soir), concernait trois articles du Soir consacrés au sponsoring de l’Opéra Royal de Wallonie par le cigarettier Japan Tobacco International (JTI) auquel la plaignante – l’ORW – reprochait un parti pris notamment pour ce qui relevait de la nature prétendument illégale de cette activité. Le CDJ, a constaté que l’analyse des informations dont le journaliste disposait et dont il avait explicité les tenants et aboutissants aux lecteurs lui permettait de conclure que la publicité et le sponsoring du cigarettier étaient en contradiction avec la loi : il a relevé que le journaliste avait fait preuve de prudence et démontré sa thèse sans écarter aucune information essentielle – dont le point de vue de la plaignante – et en vérifiant avec soin celles qu’il publiait.
La troisième plainte, non fondée (20-34 C. Brochier c. C. Emonnot, T. Portuesi & A. Vidal / BX1) visait une enquête radiophonique (podcast) réalisée par trois étudiantes en journalisme et diffusée à la fois sur BX1+ et BX1.be. La plaignante, interviewée dans cette enquête relative au débat sur l’avortement qui confrontait notamment les témoignages de militants pro-vie à ceux de militants pro-choix en Belgique et en France, reprochait aux journalistes d’accuser sans fondement le mouvement pro-vie de pratiquer de la désinformation, et de porter ainsi atteinte à sa réputation et celle de l’institut au nom duquel elle s’exprimait. Elle estimait également que les journalistes avaient manqué d’honnêteté en ne précisant pas, au moment de la solliciter, que leur enquête portait sur la question de la désinformation. Le Conseil a relevé que les journalistes, qui s’appuyaient sur de très nombreuses sources, abordaient la question de la désinformation comme moyen de dissuader les femmes d’avorter, et qu’elles démontraient clairement l’existence de certaines pratiques de désinformation au sein des opposants au droit à l’avortement, sans y associer à aucun moment ni l’ensemble du mouvement pro-vie, ni l’association de la plaignante, ni la plaignante. Le CDJ a par ailleurs estimé que les pièces fournies par les journalistes montraient qu’elles avaient explicitement informé la plaignante de l’objet de leur reportage et que c’est en connaissance de cause que celle-ci avait répondu à leurs questions. Pour autant que nécessaire, considérant que la conclusion d’un reportage n’est pas écrite avant la fin de l’enquête, le CDJ a ajouté qu’on ne saurait accuser les journalistes d’avoir sciemment menti sur l’objet d’un entretien qui constitue un point particulier d’une enquête dont la conclusion n’est pas connue et ne concerne pas la personne interviewée.
Début mars, 47 plaintes étaient en traitement au Conseil de déontologie journalistique.