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10 ans de CDJ

10 ans de CDJ. Le point de vue des rédacteurs en chef
Voilà dix ans que le Conseil de déontologie journalistique (CDJ) a été fondé. Sur ces dix ans, il aura rendu un peu plus de 300 avis et établi un code et une jurisprudence permettant aux journalistes belges francophones d’exercer leur métier de la façon la plus déontologique possible, en suivant des règles précises et communes à tous. Nous nous sommes rendus dans diverses rédactions pour tenter de déterminer l’influence concrète qu’il a exercée au cours de cette décennie.
C’est précisément le 24 novembre 1994, lors d’un congrès organisé à Liège, que l’envie de créer un conseil de déontologie s’appliquant à l’ensemble des journalistes de Belgique est partagée par l’Association générale des journalistes professionnels belges (AGJPB). Depuis 1988, l’association encore unitaire disposait d’un conseil de déontologie interne embryonnaire qui devient effectif en 1995, après ce congrès dont le but premier était à l’origine de discuter des liens et des points de divergence entre le monde judiciaire et la presse belge. Le modèle interne de l’AGJPB est une première mouture qui doit encore évoluer. Ses limites ? L’instance est composée uniquement de journalistes et n’a pas vraiment de financement. Mais si les journalistes souhaitent régler les questions déontologiques entre eux, ils avancent aussi au gré des éléments extérieurs qui font pression. Par exemple, en novembre 1995, le ministre de la Justice Stefaan De Clerck, face à l’apparent échec de l’organe déontologique de l’AGJPB, propose la création d’un « ordre des journalistes ». Cet ordre serait, selon lui, le meilleur moyen pour la profession de s’autoréguler, et de constituer un partenaire dans les discussions entre la presse et la justice, dont les relations ont toujours été tendues. Si l’idée de créer un organe d’autorégulation fonctionnel peut séduire, celle de passer par un Ordre impliquerait que la profession devienne inaccessible pour les personnes qui lui seraient extérieures. Or, l’activité de journaliste est ouverte à tout le monde.
Déjà à l’époque du congrès de Liège, la structure actuelle du CDJ s’est profilée : on parle d’un organe en deux temps qui comprendrait un bureau chargé de recevoir les plaintes et les demandes d’avis, et d’un conseil de déontologie chargé de les traiter. D’entrée de jeu, le principe cardinal d’autorégulation de la profession est établi : il n’est pas question que des personnes extérieures au métier comme des politiques se mêlent de la déontologie journalistique. Seuls les concernés sont aptes à déterminer les normes de leur métier. Cependant, la fondation du CDJ n’est pas acquise. « En un sens, l’affaire Dutroux a fait du tort au CDJ », explique Bruno Godaert, journaliste et membre fondateur du CDJ. « On craignait le pire concernant les pratiques journalistiques, mais en fin de compte il n’y a eu aucun procès directement lié à l’attitude des journalistes face à l’affaire. La presse a été remarquable, des gens se sont dit que si les journalistes ont très bien géré ça, ça prouvait d’une certaine manière qu’il n’y avait pas d’urgence à fonder un conseil de déontologie ».
En 2002, les journalistes flamands quittent la table des discussions pour la création d’un conseil de déontologie au niveau de l’AGJPB unitaire, et créent leur propre conseil de presse, le Raad voor de Journalistiek (RVDJ). Le futur CDJ ne sera donc compétent que pour les journalistes francophones et germanophones. Au fil des discussions, le projet se précise et un des premiers choix des médias et journalistes autour de la table est d’officialiser l’existence du conseil par décret pour lui assurer une pérennité dans le temps, poser les bases de son financement et articuler sa compétence à celle du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), qui veille au respect des décrets et règlements relatifs à l’audiovisuel, pour éviter un double contrôle dans le cas d’éventuels chevauchements de règles.
Bruno Godaert a participé aux négociations. Il raconte : « Les journalistes voulaient une déontologie égale pour tout le monde, que ce soit pour la presse écrite, audiovisuelle et internet qui est venu assez vite aussi dans la discussion. Du côté des médias, chacun voulait être représenté. Il faut dire qu’ils ne sont pas aussi bien organisés que les journalistes, qui eux sont représentés par des associations professionnelles. Ils restent concurrents entre eux jusqu’au bout des doigts. Il s’agissait donc de savoir qui allait siéger au CDJ mais il y avait aussi l’envie entre journalistes et médias de « régler » le problème de la déontologie. Bien sûr, il est arrivé que les négociations soient rompues, mais après cinq-six mois, les choses s’étaient apaisées et la volonté de faire aboutir les discussions était toujours présente ». Au sortir des négociations, la structure définitive du Conseil sera la suivante : deux rédacteurs en chef, six éditeurs de presse, six journalistes et six membres de la société civile choisis par les éditeurs et les journalistes constitueront le Conseil de déontologie journalistique. Le 30 avril 2009, le décret donnant son statut au CDJ est voté par le Parlement de la communauté française.

La déontologie : un aspect largement pris en compte avant la création du CDJ

Il ne faut cependant pas croire que l’intérêt pour la déontologie a coïncidé avec la naissance du CDJ, bien au contraire. Il ressort des témoignages recueillis une conscience manifeste de la déontologie bien avant sa création. A l’époque, les questions déontologiques étaient réglées en interne dans les rédactions, qui s’en occupaient selon plusieurs modèles. « Les questions de déontologies étaient gérées au jour le jour en fonction des questionnements des journalistes », raconte Michel Royer, responsable de l’information générale du groupe Sudpresse spécialisé dans l’information de proximité. « On n’avait pas de charte éditoriale à l’époque. Quand un problème se posait, soit le journaliste le gérait en autonomie, soit il allait vers son chef de service. Et si ce dernier avait d’autres questions, il se tournait vers le rédacteur en chef. C’était un petit peu ‘’au feeling’’ ».

Dans le service public, à la RTBF, en revanche, un règlement intérieur traitait ces questions. Jean-Pierre Jacqmin, directeur de l’information et des sports, relève que « certains éléments de ce texte ont d’ailleurs inspiré le code de déontologie journalistique ». Il ajoute : « La déontologie a toujours été importante à la RTBF. C’était réglé, et ça l’est toujours, au niveau du directeur de l’information. Tous les problèmes ne passent pas au niveau du CDJ et sont alors réglés en interne parfois avec des rectifications explicites amenées sur les contenus ». La rédaction de TV Lux, dernière-née des télévisions locales, possédait aussi son dispositif : « Dans nos anciens locaux, deux tableaux se sont rapidement retrouvés affichés au mur du bureau : la charte de Munich puis le Code de déontologie journalistique. A l’époque, on était une équipe de jeunes journalistes, on se basait donc sur ces documents-là. On se plaisait à les faire lire aux stagiaires et aux nouveaux pigistes », explique Christophe Thiry, rédacteur en chef de la chaîne luxembourgeoise. Du côté de la rue Royale, les règles sont plutôt intériorisées. « Depuis que je suis au Soir, soit depuis 2004, je sens une responsabilité individuelle et collective sur le fait de respecter la déontologie, et d’avoir des filtres de relecture : les chefs de service, le secrétaire de rédaction, la rédaction en chef. On est en nombre suffisant pour pouvoir se permettre ces différents filtres. Plus qu’une charte ou un document écrit, c’est une pratique au quotidien » affirme Christophe Berti, rédacteur en chef du Soir.

Un guide plutôt qu’une instance punitive

Les médias étaient donc bel et bien soucieux de la question déontologique avant la fondation du CDJ. Quelle influence a-t-il donc bien pu exercer pendant ces dix dernières années ? Dorian de Meeûs rappelle d’abord que tous les journalistes ne sont pas forcément passés par une école de journalisme, et qu’un rappel des règles est toujours nécessaire. Par ailleurs, toujours selon le rédacteur en chef de La Libre, l’arrivée du CDJ a coïncidé avec une véritable révolution médiatique, internet : « Le CDJ a été créé en même temps qu’un changement de mentalité en partie dû à l’explosion d’internet qui a montré les failles possibles dans les traitements journalistiques. Avec un peu de recul, on peut dire que la fondation du CDJ est arrivée au moment opportun ». Mais plus que d’aider à tempérer les conséquences de la révolution internet, le Conseil a influencé le comportement des journalistes. « Le CDJ a clairement un impact sur le travail journalistique, dans le sens où les journalistes n’aiment pas être condamnés, et encore moins que ça se sache si ce qui leur est reproché porte atteinte à leur honneur. Pour se protéger, la connaissance de la déontologie est donc très importante ».

Jean-Marc Gheraille, rédacteur en chef de La Dernière Heure-Les Sports va dans le même sens que Dorian de Meeûs, son collègue du groupe IPM : « Le CDJ est très important car il est « régulé » par la presse elle-même et pas par des apparatchiks qui ne connaissent rien au métier, même si je pense que la presse dite « populaire » y est un peu plus mise à mal. Il agit aussi comme une piqûre de rappel des règles déontologiques auxquelles le métier est soumis. En dix ans, le bilan est positif ». Christophe Berti souligne également ce rôle d’autorité rempli par le CDJ : « Je pense que la finalité du CDJ serait de n’avoir plus aucun problème à régler. Je ne vais pas dire que ça bouleverse notre travail au quotidien, mais ça donne un cadre à ce qu’on fait et ce qu’on est, et je lis très attentivement les avis du CDJ qui me parviennent, même quand ils ne concernent pas Le Soir. Parce que ça rappelle des pratiques et ouvre le débat ».

Christophe Thiry relève également l’importance qu’a le CDJ auprès des journalistes, mais aussi du public. : « On sait qu’il y a une instance et qu’on peut être jugé par ses pairs. Ça peut être réconfortant, parce que ça nous conforte dans notre manière de travailler. En ce qui nous concerne on a de toute façon toujours été droits dans nos bottes. Mais c’est aussi réconfortant pour le téléspectateur, il peut être entendu s’il n’est pas content ». Ce constat est partagé par Christian Neyt, rédacteur en chef adjoint de l’agence de presse Belga : « Quand il y a des litiges, le CDJ est là pour trancher, et ce n’est pas plus mal car ça permet d’avoir une sorte de formation continue sur les enjeux du journalisme et les problèmes qu’un journaliste peut rencontrer. Les avis du CDJ sont lus avec beaucoup d’attention par la rédaction en chef de Belga, et c’est un enseignement important. On peut dire en quelque sorte que ça a permis de nous ouvrir face au lectorat et à ce qu’il pourrait penser de la déontologie ».

Une institution perfectible

Dix ans, c’est encore jeune. Surtout quand on considère que le RVDJ néerlandophones a été fondé en 2002, soit sept ans avant le CDJ. Les rédacteurs interrogés suggèrent parfois des pistes d’amélioration pour le jeune Conseil, que ce soit sur sa façon de recevoir les plaintes ou sur son mode de délibération. Ainsi, plusieurs rédacteurs préfèrent les critères plus stricts de recevabilité des plaintes mises en place par le RVDJ, qui précise sur son site que « Toute personne ou organisation directement concernée par une pratique journalistique peut introduire une plainte chez le RVDJ ». Bruno Godaert comprend et rejoint ce reproche : « L’évolution que je regrette, c’est l’ouverture à des gens qui n’ont aucun intérêt à l’affaire et qui viennent malgré tout jouer les procureurs. Les Flamands ont été plus malins que nous et ont préféré se calquer sur le droit pour définir la recevabilité des plaintes. En ce qui nous concerne, ça nous donne entre 20 et 25% des plaintes supplémentaires, et quand on voit notre retard (NDLR : le traitement des plaintes du CDJ prend un certain temps, et les plaintes s’accumulant, cela provoque un retard dans la gestion des dossiers), on se dit qu’on se passerait bien de ces plaintes inutiles. D’autant plus qu’elles sont souvent non-fondées ». Il ajoute aussi : « Et c’est oublier que le CDJ a dans son règlement de procédure la possibilité de s’auto-saisir ! Donc s’il se passe quelque chose de vraiment scandaleux, on va le voir et on peut intervenir. Pour moi, donner cette possibilité des plaintes est une erreur ». Pour rappel, le CDJ ne prend pas ce critère de l’intérêt personnel en compte lors de la réception d’une plainte. Il estime que les journalistes sont responsables socialement devant le public des contenus qu’ils produisent, il est donc logique que chacun puisse l’interpeller au titre de « citoyen ». Par ailleurs, en cette période de défiance envers les médias, le Conseil affirme dans son rapport annuel de 2019 qu’il est important de répondre à toutes les plaintes, mêmes celles considérées comme irrecevables. Répondre à ces plaintes est, toujours selon le CDJ, un enjeu majeur pour restaurer la confiance des citoyens envers les médias.

Toujours au registre de la recevabilité des plaintes, des rédacteurs en chef évoquent des personnes qui menacent de porter plainte au CDJ pour intimider le journaliste, présageant ainsi, pour peu que la plainte soit formellement recevable, des démarches qui peuvent être longues et éprouvantes. « Ce qui est ennuyeux, c’est que nous avons l’impression que certains utilisent le CDJ. Ils ont le droit de porter plainte. Mais quand, prenons le cas de l’empire Nethys/Publifin (NDLR : sur lequel Le Vif a enquêté et révélé diverses affaires), on reçoit une plainte avec 62 griefs établis par un cabinet d’avocats. De notre côté, on n’a pas une armada juridique. Répondre à tous ces points demande du travail à une dizaine de journalistes. Nous pensons que certains utilisent le CDJ comme outil pour nous épuiser » déplore Thierry Fiorili, rédacteur en chef du Vif. Dorian de Meeûs tire le même constat : « Un homme politique nous a déjà menacé de nous traîner devant le CDJ, nous proposant de retirer sa plainte si on acceptait de lui offrir une grande interview. Il a finalement retiré sa plainte en période électorale car il savait qu’elle n’allait jamais être prise en compte. On ne peut accepter que le CDJ soit utilisé par des hommes politiques ou des hommes d’affaire et il faudrait que le CDJ réalise que certaines plaintes ont ce but ».

Pour sa part, Jean-Marc Gheraille déplore un manque de discussion entre les rédactions en chef et le CDJ. « Ce serait utile pour que le CDJ soit davantage au courant de notre façon de travailler, de ce qu’on demande de nos journalistes, et des plateformes sur lesquelles on fait atterrir nos sujets. Depuis 2009, le phénomène des réseaux sociaux a explosé et c’est parfois compliqué à gérer. Ce ne serait vraiment pas mal de faire une table ronde avec les rédacteurs en chef pour partager nos difficultés et donner au CDJ une vue encore plus ciblée de notre façon de fonctionner. Je sens parfois que quand on va jusqu’au sujet, je ne suis pas sûr que la globalité du problème soit vraiment comprise ».

Internet et les nouveaux défis auxquels le CDJ devra faire face

Les médias évoluent, et avec eux la question de la déontologie. On pense immédiatement à internet qui, selon la majorité des rédacteurs interrogés, pose et posera de nouvelles interrogations déontologiques sur deux aspects principaux.

Premièrement, le rythme de l’information. Comme le spécifie Dorian de Meeûs, fort de son expérience de rédacteur en chef du site web LaLibre.be : « Sur un site internet, on publie une information directement. On n’attend pas que l’information soit validée par cinq personnes. Ça multiplie le nombre d’erreurs possible. A la place d’avoir une trentaine d’articles dans un journal, on en aura 150 sur le site internet. Mathématiquement, la probabilité des plaintes est plus élevée. Il faut aussi tenir compte du fait que les journalistes web sont souvent des jeunes journalistes ».

Deuxièmement, la différenciation entre journaliste et blogueur pose question. Comment le CDJ doit se positionner sur ces questions ? Sur ce point, la réponse de Thierry Fiorili, rédacteur en chef du Vif, est catégorique. « Le CDJ ne concerne que les journalistes, le non-journaliste n’a pas à répondre aux règles du code de déontologique. Journaliste, c’est un métier, on a une carte et on est payé par des rédactions. Si demain il n’y a plus que des blogueurs, faudra-t-il un Conseil de déontologie de l’information sous toutes ses formes ? Le CDJ devrait rester concentré sur le journalisme ». Jean-Pierre Jacqmin va également dans ce sens « Le Conseil de déontologie doit faire la part entre ce qui est de l’information qui relève de la déontologie journalistique et ce qui ne l’est pas. Il doit se concentrer sur le travail réalisé par les journalistes et les rédactions, et par des gens qui font du journalisme à force de le pratiquer, et ne pas aller régler l’ensemble des problèmes ». De fait, le CDJ s’interroge au cas par cas sur la nature informationnelle et journalistique des contenus visés par la plainte. Il a ainsi déjà rendu des avis de non-compétence sur des affaires concernant par exemple le site parodique NordPresse, ainsi que sur le site internet LePeuple.be, organe de communication politique du Parti Populaire.

Face à l’émergence de ces nouveaux modèles, le directeur de l’information de la RTBF se montre toutefois optimiste sur le futur du journalisme traditionnel : « Je pense qu’il y a des signes avant-coureurs d’un retour de la confiance du public en les rédactions traditionnelles. Le dernier baromètre du Reuters Institute voit une remontée dans la confiance des médias de service public et dans les médias ‘’mainstream’’, alors qu’internet et les réseaux sociaux perdent la confiance du public. Ce sont des gages qui montrent bien que le travail professionnel des journalistes garantit la confiance du public ». En effet, dans son rapport de l’année 2019, l’institut de recherche britannique souligne que le nombre d’abonnés aux publications telles que le New York Times, le Financial Times, Mediapart, ou The Guardian a augmenté de telle sorte que les revenus apportés par les lecteurs constituent désormais une véritable alternative à la publicité en ligne1.

Christophe Thiry, quant à lui, est plus partagé sur la question : « Par rapport aux médias ‘’émergents’’, et il y en a en province de Luxembourg, je n’ai pas le sentiment qu’ils soient soumis, ou qu’ils se soumettent eux-mêmes, aux règles déontologiques. Jusqu’où le CDJ va donner des avis ? Pour quels médias ? A partir de quand peut-on considérer qu’un média puisse faire l’objet d’une plainte au CDJ ? Je vois sur le terrain que certains ne prêtent pas la même attention au recoupement de l’information, aux règles de citation, au droit à l’image. A propos du droit à l’image, on sort d’un week-end de festival où on s’efforce de prendre les autorisations de filmer auprès des artistes, et dans le même temps tout le monde est occupé à filmer et publier sur internet sans demander les autorisations des gens sur place. Est-ce qu’à l’avenir, les médias seront toujours soumis aux règles actuelles concernant le droit à l’image ? »

Par ailleurs, en septembre a été lancée LN24, la première chaîne radio et TV d’information en continu de la Belgique francophone. Or, l’on sait que ces chaînes d’information en continu sont l’objet de polémiques parfois retentissantes. Il suffit de se tourner vers la France notamment où les médias ne sont pas soumis à un code de déontologie mais se trouvent dans une situation similaire à la Belgique francophone d’avant 2009 : chaque rédaction a sa charte d’éthique et de déontologie interne. Dès lors, comment le CDJ sera pris en compte dans le dispositif de la jeune chaîne privée ? Joan Condijts, ancien rédacteur en chef du journal L’Echo, directeur de l’information de la chaîne de radio et télévision, explique comment le média compte aborder ce genre de questions. « LN24 a rédigé une charte de déontologie journalistique extrêmement claire. Tout d’abord, notre ligne éditoriale défend un journalisme qualitatif, ça réduit les risques de dérapage, on réalise un travail en amont. On va aussi travailler avec les équipes pour les imprégner du journalisme qu’on veut défendre et des valeurs inscrites dans notre charte. C’est un travail préventif, même si je pense que les jeunes sont bien formés dans les écoles et bien en phase avec la déontologie. Après, personne n’est à l’abri d’un dérapage sur le terrain, et si dérapage il y a, on essaiera de réparer les dégâts causés et d’en tirer les leçons pour éviter qu’il se reproduise ».

Sur ses dix années d’existence, le CDJ a réussi à s’imposer comme une autorité bienvenue pour la profession de journaliste. En basant son action sur des avis -rendus publics – et des conseils plutôt que sur des sanctions punitives, il semble s’être montré plus efficace que n’importe quelle règle ou instance émanant d’un pouvoir externe. Mais au-delà de la question de l’efficacité de ses avis, recommandations, de sa jurisprudence, c’est son rôle de guide pratique qu’ont retenu les rédacteurs en chef durant cette décennie. Et ce même si certains d’entre eux ont parfois être en désaccord avec des avis rendus. Mais il ne faut pas oublier que tout comme le métier de journaliste, la déontologie n’est pas figée dans le marbre et sera sans doute amenée à changer ou s’adapter dans les années à venir.

 

Clément Manguette – septembre 2019

1 Le rapport est disponible à l’adresse suivante : https://reutersinstitute.politics.ox.ac.uk/our-research/journalism-media-and-technology-trends-and-predictions-2019


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